Lieu-dit: les Chênes

Une gerbe d'eau boueuse se soulève au passage de la berline noire. Celle-çi tressaute un petit peu à cause de la déformation de la route de campagne.

"Le dégel se fait énormément sentir sur les routes de campagnes. J'ai l'impression qu'ici, c'est pire qu'en Allemagne."

En regardant par la fenêtre, Luther note qu'ils pénètrent dans un lieu-dit, "les Chênes". Et comme réponse à cette prédiction, la route se borde tout à coup d'une rangée de chênes. La berline ralentit, et finit par tourner, prenant un chemin secondaire. Elle stope quelques mètres plus bas. Un soldat rapplique en courant pour ouvrir la porte du Generalleuntant Lumpel. Les deux gradés sont menés aux abords d'un champ.
À son extrémité, la carcasse d'un avion qui a pris feu semble avoir été stopée par quelques arbres. Une trainée de terre indique que l'avion a glissé sur plusieurs mètres. Quelques bouts de métals sont éparpillés tout autour. Le choc, à l'aterrissage comme sur les arbres, avaient dû être dur.

Luther est rejoint par ses hommes. Lumpel lui adresse un signe de tête. Des lettres, "2-JU" imprimées en blanc sur la carlingue à demi consumées lui signalent qu'il s'agit bien du Tante Ju.

"Voilà votre homme. Si je puis dire. Je vous laisse le champ libre..."

Lumpel s'en va interroger ses hommes sur d'éventuelles informations.

Wachendorf, après avoir remercier le Général, se frotte les mains. Enfin, te voilà petit avion... Entouré de ses hommes, il avance vers la carcasse. Il essaie de jeter des coups d'oeil à l'intérieur, mais fait finalement signe à un soldat. Il le salut, puis l'interroge.

"Où sont les corps? Avez-vous correctement fouillé la carcasse? Qu'avez-vous trouvé exactement?"

"Aeuhm..."

Le soldat s'éclaircit la voix. En déglutissant, il montre du doigt deux corps, couverts par des draps blancs, de l'autre coté de l'avion. Il mène Luther aurpès d'eux.

"Nous avons retrouvé ses deux corps... Pas très beau à voir. Les deux pilotes. L'avion ne devait transporter que quelques caisses de munitions qui ont explosées à l'impact. C'est tout ce que l'on a retrouvé..."

Luther s'approche des deux corps en fronçant les sourcils. Du bout du pied, il soulève le drap blanc. En appercevant les corps mutilés par le feu, Wachendorf recule d'un pas.

"Ils n'étaient pas seuls dans cet avion... D'après mes informations, il y avait d'autres passagers... Merde... Il faut les retrouver !"

Wachendorf balaie la zone du regard. Puis il se tourne vers ses hommes.

"Hans, rentre dans la carcasse et fouille-la... Dieter, Theobald fouillez les environs. Relevez la moindre trace. Les survivants sont certainement blessés. Il faut les trouver..."

Alors que les hommes de Luther s'activent, il est interpellé par Lumpel se tenant au pied d'un arbre avec deux soldats. L'appel à l'air assez important pour que Luther le rejoigne à petites foulées. Il pend des branches de l'arbre quelques cordes, tranchées au couteau, mais emméllées dans les branchages. Lumpel interroge Luther du regard:

"À quoi ça vous fait penser ?"

Il sourit.

"Ce sont des cordes utilisées pour les parachutes, Herr Wachendorf. Il y a un survivant. Je suppose que vous voulez garder cette chasse pour vous ? Mes hommes sont entrain de ramener les débris éparpillés aux alentours..."

Wachendorf observe les cordes en souriant. Il fait le tour de l'arbre, tête levé, en essayant d'autres traces de parachute aux alentours. Puis il revient auprès le Lumpel.

"Je vous remercie mon Général. Je retrouverais ce terroriste. Si, de votre côté, vous pouviez mettre en place des barrages routiers dans la région, ce serait, je pense, utile. Que nos soldats fouillent tout ce qui tente de quitter la région. Nous recherchons un crâne de cristal qui cache des informations capitales. Et qu'ils prennent soin de cette pièce..."

Se tournant vers la carcasse, Luther fait signe à ses hommes d'arrèter ce qu'ils ont entrepris, pour le rejoindre. La chasse va commencer.

Après avoir appelé ses hommes, Wachendorf revient vers ce qu'il a aperçu en faisant le tour de l'arbre: ce n'est pas, comme il l'espérait, un autre parachute, mais un bout de tissu, tombé dans un petit buisson. Luther l'examine: d'origine bleu-gris il est taché de sang.

Hans, Dieter et Theobald se présente devant lui en même temps que retentissent les ordres lancés par Lumpel à l'initiative de Luther. Dieter comprend très vite la situation en aperçevant les cordes et le tissu taché.

"On va donc pouvoir commencer à s'amuser... Très bien, on commence par la ferme ?"

La ferme dont pare Dieter est celle qui porte le nom du lieu-dit: Les Chênes. Elle se trouve à une centaine de mètres de la carcasse, derrière un petit talus.

Luther glisse le bout de tissu dans une poche, puis il se redresse pour faire face à la ferme en question. C'est en souriant que l'Officier SS pose la main sur le 9mm qui orne sa ceinture. D'un geste précis, il dégage l'arme de son étui.

"On commence par la ferme... Ouvrez l'oeil... On avance discrètement."

En bon chef, Wachendorf montre le chemin. Il progresse avec précaution, en jettant des coups d'oeil tantôt sur le sol devant lui, tantôt sur la bâtisse. Le brésilien est peut-être là-dedans, et armé... A l'abris des arbres, l'Allemand continue d'avancer.

Et il avance sans que rien ne se produise. Même lorsqu'il est à découvert, les volets mi-clos de la petite ferme ne bougent pas. C'est une petite maisonnette, qui enserre une cour avec une petite grange. Il n'y a aucun bruit, si ce n'est quelques poules qui gloussent dans la grange.

Très vite, Luther atteint le mur de la maison. Il s'y colle, entre une petite fenêtre et la porte, en prenant garde à ne pas se faire repérer par un éventuel occupant. Il jette un coup d'oeil à ses hommes. Un l'a suivit, et s'est glissé contre le mur. Accroupi, il est invisible de l'intérieur. Les deux autres sont encore derrière les arbres, en partie protégés.

Luther fait signe aux deux hommes en retrait, derrière les arbres, de faire le tour de la bâtisse, pour couper toute tentative de fuite.

Après quelques secondes d'immobilité, pour laisser le temps aux deux soldats de prendre position, Wachendorf se place d'un côté de la porte. Son acolyte se place de l'autre côté.

Un regard, puis Luther attrape discrètement la poignée. Il l'abaisse lentement. Si la porte n'est pas vérouillé, alors, il rentrera, suivi de son subordonné.

Si la porte est vérouillé, on avisera...

La porte n'est pas verrouillé. Luther pénètre donc dans le maisonette suivit de son homme. L'intérieur est sombre, la lumière peine à entrer par les petites fenêtres. Ca sent le renfermé, le bêtail, les poules. Le sol est de petites briques, le plafond est de poutres apparentes. Les murs sont délavés. Il n'y a personne. Sur la table, au milieu de la pièce: trois assiettes. Deux sont quasiment vides, la dernière est à peine entamée. Le repas est froid. Et, l'homme de main de Luther qui est allé voir dans la chambre, revient avec un signe de tête négatif. Il n'y a plus personne.

"Scheiße !"

Luther administre un violent coup de pied dans la table pour manifester son mécontentement. Puis il appelle ses deux hommes, restés derrière la bâtisse.

"Fouillez rapidement les lieux. On partira ensuite à la chasse... Ils ne sont pas loin. Ils ont certainement fuit à l'arrivée de la cavalerie..."

Sur ces mots, Wachendorf quitte la ferme pour laisser le soin à ses hommes de tout dévaster pour, très certainement, ne rien trouver...

Alors qu'il s'éloigne, Luther entend un cri de surprise poussé par une femme. Il accourt dans la grange: un de ses hommes, Théobald, tient en joue un couple de vieux paysans, cachés dans une cave. La trappe était légèrement camouflée par de petites bottes de foin. La vieille est totalement appeurée, elle sanglote. Son mari la tient dans ses bras, hypnotisé par l'arme.

"J'ai déniché deux petits oiseaux. Je les tue direct ou je les laisse sortir de leur trou à rat ?", lance Théobald ironiquement.

Un sourire se dessine sur le visage de Wachendorf. le Luger qui venait de rejoindre son holster est de retour dans la main de l'officier nazi.

"Traine-moi ces parasites dehors..."

Luther se place devant la grange, l'arme bien en vue. Théobald le rejoint, avec les deux paysans. L'Allemand s'applique à chercher ses mots, en Français. Calmement...

"Où sont les rescapés de l'accident? Combien sont-ils?"

Le petit vieux ne pipe mot. Il regarde Luther d'un oeil neutre, la bouche fermée, tenant toujours sa femme entre ses bras. Celle-ci est maintenant totalement terrorisée, elle pleure tandis que ses bas se tachent de boue.

"Ne nous tuez pas. Ne nous tuez pas" parvient-elle tout juste à articuler.

Luther s'approche du couple, il adresse un coup de pied à l'homme. Puis lui attrape le bras et le tire vers lui. Si la femme s'accroche, elle prendra son coup de pied également.

Une fois les vieux paysans séparés, Luther pose le canon de son arme sur la tempe du bonhomme. Puis il pose les yeux sur la femme.

"Si tu ne réponds pas, il meurt... Combien? Et où?"

Doigt sur la gâchette. Une mauvaise réponse et la tête explose...

La vieille pête un cable, elle ne pleure plus, elle ne crie pas, elle hurle ! Elle tente désepérement de se raccrocher à un membre de son mari, mais Théobald la tient fermement par un bras, et la tire en arrière si elle avance trop. Elle se rebelle, tente de le mordre, se prend un autre coup de crosse, s'affalle dans la boue gelée. Et pleure derechef.

"Je sais paaas... *snif* C'est elle qui nous a cachée. Elle *snif* Elle est partie ensuite !!! Le tuez paaas..."

Les cris de la vieille femme arrachent une grimace à Luther. Si les informations détenues n'étaient pas aussi importantes, il ferait taire les beuglements avec du plomb.

Viennent ensuite les propos, fort peu précis, qui poussent Wachendorf à froncer les sourcils. "Elle"? Une femme?

"Qui c'est cette elle? Un nom... Une description... Magne toi et arrête de chialer, je n'aime pas ça..."

Wachendorf pensait courir après des sauvages sud-américains. En fait, c'est une sauvage... Ca devient presque facile.

La petite vieille se met en colère. Même si ses larmes continuent couler, elle semble être plus forte pour s'accrocher à la vie. Elle crache, fulmine, contre la boue. Son regard coléreux agresse la terre froide.

"Je sais pas, je vous dis !! Une... Une étrangère !! Espagnole, je sais pas... Seule... Avec une petite valise..."

Elle se tait, tient ses lèvres pincées, regarde son mari par en dessous. Lui, s'est un peu détendu suite aux révélations de sa femme: il pèse un peu plus sous le bras de Luther.

Le vieux complète, d'une voix calme:

"Elle dit vrai. Elle avait un accent espagnol; cheveux longs et bruns, sportive. Elle est armée."

[HJ : Désolé du retard de réponse]

On avance laborieusement. Dernière tentative avant de sortir un couteau afin d'arracher plus de détails... Luther s'adresse désormais aux deux paysans.

"Que vous a-t-elle dit exactement? Où voulait-elle aller? Dans quelle direction est-elle partie? Quand est-elle partie?"

Beaucoup de question, certes. Mais il faut faire vite, le temps joue contre Wachendorf.

La vieille se remet à sangloter. Elle secoue sa tête négativement, à quatre-pattes dans la boue. Son mari, toujours tenu par Luther, répond à sa place:

"On est là-dedans depuis hier soir, vers dix heures et demi. Elle nous a cachés pour couvrir sa fuite lorsqu'on a entendu les premiers véhicules allemands. Nous étions terrorisés, elle nous a dit de ne pas bouger jusqu'à que nous n'entendions plus rien. Je ne sais pas par où elle est partie..."

Luther relache le bonhomme et range son arme délicatement. Il fait signe à ses hommes d'approcher.

"Hans, trouve moi une carte de la région. Dieter, va demander à Lumpel de prévenir le RSHA. Donne la description de la dangereuse espionne. Il faut mettre en place des barrages. Et surtout, demande à ce que je sois directement prévenu, si une patrouille SP, SS ou même militaire, attrape quelqu'un correspondant au signalement."

Retour à la langue de Molière et aux paysans. Avant que ses hommes n'obéissent, une dernière question.

"Au fait... Pas de véhicules? Elle a fuit à pied?"

"À pied oui..."

Le paysan, maintenant beaucoup plus fatigué qu'appeuré, se couche en arrière, sur ses coudes. Il regarde sa femme, muet.

Les hommes de Luther s'activent. Hans revient très vite, avec deux cartes en main (Carte 1 ; Carte 2). Il les tend à Luther.

"Voilà une carte de la région, l'autre étant celle de la région voisine. La frontière avec la zone libre est à quelques kilomètres de là, sur la N15."

Abandonnant les paysans à leur boue, Luther attrape les cartes et retourne du côté de la carcasse de l'avion. Il déplie les deux morceaux de papier plastifié sur le capot d'une des berlines allemandes. Du bout du doigt, il cherche à localiser l'endroit où ils se trouvent.

"Bien... La N15 est là... Franchement, je doute que rejoindre la zone libre ait été l'objectif de l'avion. Sinon, qu'est-ce qu'il foutrait là? En venant du Brésil, pour rejoindre le Sud de la France, il y avait plus court comme trajectoire... D'autant plus que, d'après les information de la Luftwaffe, il volait en direction du Nord-Est."

Balayant la carte du regard, Luther réfléchit longuement...

"Maintenant, cette pute judéo-bolchévique est peut-être blessée. En tous cas, l'accident a, à n'en point douter, perturbé ses plans. Donc, elle peut effectivement avoir décidé de rejoindre la zone libre."

Véritable casse-tête. Wachendorf n'a pas la moindre idée de la direction qu'aurait pû prendre cette catin brésilienne.

"Elle a une poignée d'heures d'avance. Mais, si j'en crois mon esprit de déduction, elle n'a pas de contacts ici. Ce n'était, à priori, pas sa destination, donc, elle est seule.

Sur la carte, la ville de Tours est au Nord-Est et dispose d'un aéroport... On va aller visiter cette petite cité."

Wachendorf laisse le soin à l'un de ses hommes de replier les cartes. Puis il se dirige vers Lumpel.

"Mon Général, je vais prendre la direction de Tours. Je vais rejoindre le siège de la SIPO locale. Pour les recherches dans le coin, et les barrages routiers, que pouvez-vous faire Mon Général?"